La misérabilité sociale qui mine la Martinique. À qui incombe la faute ?

 La misérabilité sociale qui mine la Martinique. À qui incombe la faute ?

« Comme à l’accoutumée nos politiciens d’apparat restent aphones et invisibles quand il s’agit de crise sociale, mais outrageusement bavards et hypocritement empathiques lors des élections. »

L’épineuse question qui se pose à notre société Martiniquaise est de savoir pourquoi des grèves au demeurant pacifiques engendrent tant d’éruptions de violence. Il est très facile de faire porter la responsabilité sur les mouvements de contestations populaires ou sociaux quand on n’a aucune idée des raisons qui sous-tendent les commissions des faits délictueux difficiles à excuser. Même doué de rationalité nos analystes se laissent prendre dans le jeu de la rhétorique politicienne consistant à une condamnation des actes de dégradation qui de fait oblitère les causes ethno-sociologiques inhérentes à ceux-ci. Trop souvent par facilité de réflexion ou par enfumage, les éléments factuels de causalité des actes répréhensibles sont occultés. 

Comprendre n’est pas cautionner

Il serait nécessaire d’analyser les causes permettant de comprendre les raisons profondes poussant des groupes à accéder à un tel niveau de violence. Décrypter les mécanismes sociologiques profonds provoquant leur mal-être dont les actions pénalisent toute la société, permettrait de juguler sa monté induite par les insatisfactions dont les éléments semblent tant souffrir. Comprendre n’est pas cautionner mais aider à chercher les solutions de résolution de ce phénomène montant dans notre île afin de l’endiguer. Les raccourcis sont vite faits à propos de cette violence à fleur de peau résultant des multitudes de frustrations ataviques. Les atavismes de révolte et de colère perdurent encore jusqu’à nos jours faute d’avoir été expurgés de notre mémoire collective.

Les fréquents anathèmes jetés sur cette jeunesse mis au ban de la société a exclusivement pour causalité la violence sous-jacente des institutions gouvernementales sourdes aux sempiternelles doléances de véritable continuité territoriale sur la base d’une réelle égalité. Bien appliquée elle traiterait rationnellement un grand nombre de problèmes liés au chômage dans les Antilles-Guyane considérés Français jusqu’à maintenant que sur papier. 

Les conséquences délétères du chômage sont plus insidieuses que ne le pensent ceux qui ont la chance de se réaliser socialement. Il est difficile de se mettre dans la peau de ceux qui se sentent en marge de la société du fait de ne pouvoir participer à l’activité sociale valorisante la plus ordinaire : L’accès au travail fusse-t-il sporadique. Cet état de fait plonge le démuni de ce simple élément de socialité dans les méandres profondes de la déliquescence en regard de la durée de sa marginalisation.

La misérabilité sociale qui mine la société

Les postulats, les raccourcis, à propos de la violence manifestée par cette frange de la population, fragilisée par l’incapacité de la société à la sortir de la misérabilité sociale qui la mine, sont les manifestations de la fracture existante entre les différents membres de notre société selon leur degré d’intégration dans le monde du travail.

Dans toutes les manifestations contestataires, des bandes organisées ou non profitent du moment pour s’adonner à des exactions sans égard aux valeurs des biens issus du travail d’autrui .

Faut-il incriminer les organisateurs des rassemblements souvent au demeurant pacifique dans lesquels s’infiltrent des anticonformistes de tout acabit inconscient de la portée des préjudices supportés par leurs victimes. 

Faut-il diaboliser ces mouvements qui ont pour unique motif de défendre leurs intérêts vitaux dans lesquels  s’immiscent les adeptes du pillage qu’ils considèrent comme un exutoire à leurs frustrations?

Par simplisme ou par manipulation profitant à ceux qui en tirent parti, toutes ces violences sont imputées aux groupes luttant pour des causes qui contrarient les plans des profiteurs d’un néo système d’habitation insidieusement entretenu par la caste béké. Les citoyens les plus jeunes que le manque de perspective d’avenir, plongent dans le désœuvrement et trouvent dans les exactions une satisfaction personnelle que leur prive l’équilibre de la stabilité sociale, inhibitrice a plus d’un titre de violence gratuite. Décrédibiliser, diaboliser le mouvement de contestation contre le pass sanitaire dont on est presque certain que les grévistes sont étrangers à ces détériorations est chose facile.  

Cette France paternaliste en mode choix de Hobson

Les raccourcis faciles en rapport avec les conséquences malheureuses de la désespérance de la jeunesse évitent de poser les vrais questions sur la responsabilité de l’état français à propos du traitement différencié de nos îles ultra-marines. La politique menée dans ces parties lointaines de la France relève plus d’une gestion coloniale améliorée au cours du temps passé depuis la départementalisation que d’une volonté de faire avancer Socialement et économiquement notre île. Maintenir les territoires outre-France dans la permanence d’attente d’aide de l’état permet un ancrage et un attachement plus grand de ces populations à une France nourricière. Rien ne semble avoir réellement changé depuis des décennies .

L’assistanat qui nous est reproché est entretenu par ceux la même qui nous y enfoncent. L’aliénation à cette France paternaliste a toujours été élaborée en mode choix de Hobson. Le gouvernement connait parfaitement la réalité psychosociale de nos îles, sa réponse agressive constituant à déployer des corps d’élite dont les missions premières sont la lutte contre le terrorisme et le grand banditisme démontre que les citoyens de l’outre-France ne sont pas considérés sur le même plan d’égalité. Serait-on peu ou prou français selon que l’on vivrait en France intra-muros ou dans des dépendances subordonnées à un concept politique dit une et indivisible ?

Des casseurs combattus comme des terroristes au Mali

Le président Macron a martelé que le pays était en guerre, cette expression n’a-t-elle pas eu une portée plus large dans l’esprit d’une frange de la population qui tous les jours se bat contre la misère contre laquelle elle est en guerre ? La guerre n’appelle-t-elle pas la guerre? Lors des exactions des black- block pendant les manifestations des gilets jaunes qui ont crées de terribles troubles à l’ordre publics hors du commun, le gouvernement a-t-il envoyé au plus fort de ces moments le GIGN ou le RAID, ces forces d’élites spécialement destinées à la lutte contre le terrorisme pour mettre fin à ces dégradations dont celles de l’arc de triomphe grand symbole de la grandeur de la France triomphante?

Ces casseurs sont-ils considérés comme des terroristes pour qu’il soit besoin de les combattre comme ils sont combattus au Mali ? A moins que le gouvernement français ne veuille réaffirmer ses atavismes colonialistes et ait recours aux anciennes méthodes de cette époque dont les réminiscences sont encore palpables dans nos territoires. Que faut-il y penser ?

Est-ce une manière de démonter aux populations d’outre-France qu’ils ne sont que des français totalement à part et devraient s’en tenir à cette conception de français de seconde zone asservis qui doivent être tenu en laisse?

Que viennent faire le GIGN le RAID et quelle gravité extraordinaire de situation impose un déplacement de force spéciales ? Serait-ce la peur de ne pouvoir contrôler des descendants d’Esclaves instinctivement rebelles aux dictats et qui ont toujours refusés la soumission sous toutes ses formes?

Qu’il y a-t-il de si grave pour qu’ils soient dirigés en Martinique qui a les mêmes revendications que notre île sœur ? Que valent les droits de l’homme dont se targuent tant les représentants de la France ? Le gouvernement s’est bien gardé de faire appel à ces forces lors des manifestations des gilets jaunes sachant que de telles mesures seraient considérées comme une agression anti-démocratique contre le peuple de France.

Une décision de lancer des troupes spéciales ne peut se faire sans l’assentiment du président de la république. Il aurait été radicalement et unanimement condamné par toutes les forces politiques qui verraient en cela un acte d’agression contre le peuple français . Pourquoi une telle décision est-elle permise contre les guadeloupéens et si besoin contre les Martiniquais? C’est bien la preuve que le français de France intra-muros et ceux d’outre-france et d’ailleurs ne sont pas logés sur le même plan d’égalité. 

Un chômage sévissant durablement dans notre jeunesse

Dans notre pays le chômage sévit durement et durablement dans notre jeunesse. Le manque de perspective sociale surtout chez les jeunes en manque de formation et le manque d’emploi sont facteurs d’oisiveté favorisant l’obtention d’argent facile et de tentations de toutes sortes. L’oisiveté, mère de tous les vices, est la cause principale des exactions et pillages conséquents au désoeuvrement de cette jeunesse oubliée du monde du travail forgeant leur personnalité dans un entre-soi pervers et belliqueux. Les actions fébriles en faveur de l’emploi n’ont en rien jugulé le flux montant du chômage. 

Le tissu social de la Martinique composé en plus grande partie de PPME et TPE véritable baromètre de l’économie Martiniquaise subit les contre-coups de la crise du covid. Cette crise sanitaire vient saborder tous les efforts en faveur de l’emploi fourni par les sociaux-professionnels dont leur pugnacité avait commencé à créer une petite rétractation de la courbe du chômage remarquée par l’INSEE. Aucunes mesures fortes en leur faveur et moins encore en faveur de l’emploi n’ont été réellement élaborées pour la Martinique afin de combattre le chômage destructeur d’espoir.

Comment redonner confiance à ces jeunes en quête de mauvais coups malgré eux dont pour une grande partie une réversibilité de leur état est encore possible? Les dégradations, les exactions dont ils semblent n’avoir cure sont l’expression d’un désarroi et d’un manque d’estime de soi inhérents aux contingences d’une société qui ne leurs propose aucune vision d’avenir constructif. Ils ne trouvent une reconnaissance égotique que dans des actes inacceptables pour cette société qui n’a rien à leurs offrir et dans laquelle ils estiment être rejetés. Quid des blacks-block en mode sans idéologie. La cause est à chercher dans cette direction que de vouloir pourfendre un mouvement de personnes qui cherchent une alternative à leurs problèmes actuels dans lequel s’agrègent des groupes revendiquant leur souffrance de manière répréhensible.  Est-ce la volonté des membres et des organisateurs du mouvement de grève qui perdraient beaucoup à sortir de la l’égalité ?

Nos politiciens sont aphones et invisibles quand il s’agit de crise sociale mais outrageusement bavards et hypocritement empathiques lors des élections

Comme à l’accoutumée nos politiciens d’apparat restent aphones et invisibles quand il s’agit de crise sociale, mais outrageusement bavards et hypocritement empathiques lors des élections. Ils gagneraient en notoriété et respect en s’engageant à côté de leur peuples réciproques pour créer les conditions d’un bien vivre-ensemble qui réconcilierait la politique et le citoyen. Ils s’honoreraient de sortir de leurs états de politiciens vassalisés pour se mettre réellement à l’écoute des doléances de leurs populations en souffrance. Leurs engagements respectés estomperaient l’aporie des populations antillaises qui pour l’heure ne voient dans leurs atermoiements qu’une domesticité d’une époque passée. 

Christian Magloire, le 16/12/21

1 Comment

  • Victimisation à outrance

    Comme toujours, la France est coupable , pas assez d’aide, c’est du mépris, trop d’aide, c’est de l’asservissèrent post Kolonialiste !
    Ne pas envoyer de forces de renfort ( policier ou sanitaire) serait du mépris, en envoyer, c’est de l’ingérence
    Le Gign n’a blessé aucune personne
    Comparer l’envoi du Gign en Martinique à l’opération anti terroriste au Mali relève de la Auant aux black box et autre mouvementa d’extrême droite, oui le Gign les traque !
    Vous indiquez que le tissu des entreprises en Martinique sont des TPE !
    Vrai ! Et ce sont elles qui mettent la clé sous la porte après des grèves qui sont des automutilations perpétrées par les syndicats contre les structures qu’ils sont censés défendre, protéger

    M Magloire, tout est à jeter selon vous, Békés, élus locaux, la France Kolonialiste avec la Kaf

    Que proposez vous à part Magloire pour attendre nice jour de gloire qui n’arrive pas ?

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