« ….si je ne soutiendrai pas la cause de Pap Ndiaye je ne le diaboliserai pas. »

 « ….si je ne soutiendrai pas la cause de Pap Ndiaye je ne le diaboliserai pas. »

J’ai connu Pap Ndiaye par son livre la condition noire qu’il a sorti à l’été 2006 ou 2007. En tous cas c’était au lendemain des émeutes de banlieue de 2005.
Les médias avait présenté son livre comme un véritable événement. Et à l’époque, ça l’était puisqu’il était extrêmement rare qu’on écrive sur les Noirs et plus rare encore qu’un Noir écrive sur les Noirs de France.
Quand le livre est sorti il y en avait des piles et des piles à la Fnac.
J’ai acheté le livre avec un fort enthousiasme.
Mais des l’avant-propos j’avais été déçu et même douché.
Pap Ndiaye racontait une anecdote sur lui définitivement révélatrice.
Il expliquait qu’il était étudiant dans une fac américaine. Et là-bas il n’y avait rien de plus normal que le fait que les Noirs aient leurs propres organisations noires sur les campus.
Et quand un Noir lui avait demandé s’il comptait venir à une de leurs réunions, il avait été surpris et même choqué.
Parce qu’il ne s’était jamais considéré comme un Noir.
Son père était certes noir mais il avait quitté le foyer familial alors qu’il était en bas âge et sa soeur et lui ont été élevés par leur seule mère qui était française et enseignante je crois.
Il n’avait eu jusque là aucun contact avec les mondes immigrés de France et encore moins avec le Sénégal et l’Afrique noire.
En fait il était un pur petit français à cette différence prêt qu’il avait la peau noire.
Il était néanmoins allé à la réunion de l’organisation estudiantine noire étatsuniennne en question et cela avait provoqué chez lui un déclic et même une révélation intellectuelle qui manifestement a orienté la suite de sa carrière.
Mais concernant son livre il y avait donc tromperie sur la marchandise, Pap Ndiaye n’était pas un Noir, m’as un Blanc à peau noire qui avait écrit sur la condition des Noirs de France.
Et cela se ressentait dans son livre que j’avais tout de même lu jusqu’au bout.
Le style était universitaire lourd rébarbatif sans le moindre swing, sans blues presque sans émotion mais le texte était rempli de sources et d’événements de l’histoire des Noirs de France et de leurs ancêtres indigènes des colonies africaines . Pap Ndiaye y a rapporté les faits sur les tirailleurs les premiers immigrés de France, les immigrés historiques.
Son livre fonctionne donc comme un excellent dictionnaire de l’histoire des Noirs francophones et des Noirs de France.
Mais Pap Ndiaye n’y prend pas personnellement position sur la condition noire, il s’arrête à une description des faits.
À ce propos Sadri Kiari, l’un des tous premiers tenants des thèses décoloniales en France écrivit dès 2012 que :  » Pap Ndiaye est un intellectuel noir engagé attaché à réintégrer la  » question raciale  » dans le débat public…pour peu cependant qu’on examine de près son livre la condition noire on s’aperçoit qu’il n’en est rien. Chaque fois que Pap Ndiaye énonce une idée qui pourrait faire mouche, il s’empresse de désamorcer son arme  »
Le titre de l’article de Sadri Kiari est à lui seul tout un programme, et totalement explicite sur l’analyse des intentions politiques de Pap Ndiaye puisque Sadri Kiari a intitulé son texte dans son style qui lui est si propre, unique et même inimitable : Pap Ndiaye tire à blanc.
Dès la lecture de la condition noire j’étais personnellement arrivé à la même conclusion que Sadri Kiari.
Et aujourd’hui Pap Ndiaye est utilisé par Macron comme un cheval de Troie macroniste parti à la conquête du grand courant de la gauche radicale française qui aux dernières élections à fait 22% et est devenu la troisième force politique de France.
Macron cherche à absorber ce courant politique dans sa volonté centriste de contrôler tout le champ politique français
D’où la nomination à l’éducation nationale d’un homme dont le profil peut paraître woke indigénisre déconstructionniste mais en fait ne l’est pas.
Pap Ndiaye est un petit Obama qui surfe sur les courants anti-racistes de son époque et de son pays pour mieux faire carrière dans le système.
Il l’a dit lui même : son camp c’est la méritocratie républicaine. Un  » I have a dream à la Elisabeth Borne en version noire « . De la poudre de perlimpinpin en somme que Pap Ndiaye souffle depuis 15 ans au visage des Noirs et des immigrés pour mieux les enfumer.
Pap Ndiaye a toujours fait carrière sur la question noire sans soutenir cette cause. D’où le fait qu’il ait été pendant quelques mois à la tête de l’instance qui gère le musée de l’histoire de l’immigration
Mais les Immigrés ce n’est pas vraiment son problème, il ne les connait pas. Il ne peut donc pas parler pour eux .
Pap Ndiaye a donc toujours participé à récupérer et étouffer les aspirations légitimes des Noirs de France pour le profit du système.
Cela ne m’empêchera pas de rester vigilant sur les agressions racistes qu’il ne manque pas de déjà subir, tout juste nommé ministre.
Éric le possédé, a déjà commencé à diaboliser Pap Ndiaye en le qualifiant de wokiste et d’Indigéniste qui cherche à déconstruire la France.
Pour Goldnadel la nomination de Pap Ndiaye est une honte et un danger pour la France.
Les ordures de journaleux racistes de Cnews l’ont accusé d’avoir osé dire qu’en France les violences policières sont une réalité.
On le traite d’anti-Blanquer pour laisser entendre qu’il serait anti-Blanc.
Alors que Pap Ndiaye en tant qu’historien n’a fait que travailler sur un pan de l’histoire de France : l’esclavage la colonisation l’immigration, certes sans profondeur activiste mais avec honnêteté intellectuelle, rationalité.
Sa nomination et ses travaux montrent à travers toutes ces réactions de haine qu’un Noir en France n’a toujours pas le droit de jouir de la même liberté de conscience qu’un Blanc.
Because bien sûr la réalité du racisme systémique qui y sévit.
Voilà pourquoi si je ne soutiendrai pas la cause de Pap Ndiaye je ne le diaboliserai pas.
Je pense même qu’un dialogue avec une telle personnalité m’enrichirait même s’il n’aboutirait à rien
Pap Ndiaye vient de prendre son service et ça risque d’être extrêmement chaud pour son statut de Noir de la maison.
Ahmad Ngoubo

1 Comment

  • Que Pap Ndiaye raconte, dans sa préface, qu’être noir n’avait jamais eu, en quelque part, aucune signification, n’est pas le synonyme du fait qu’il puisse être un « blanc à la peau noire », pour reprendre l’expression employée. Ce qu’il a probablement voulu dire, c’est qu’ayant grandi sans ce père noir avec qui il aurait interagi, et avec qui il aurait pris conscience du fait qu’il est noir, il a évolué dans un univers, élevé par une mère apparemment blanche, qui à aucun moment, ne l’a renvoyé à son identité ethnique. Et après tout ce vécu, c’est normal et cohérent qu’il ait connu un choc culturel qui lui a fait prendre conscience de cette identité ethnique.

    C’est exactement le cas de nombreux jeunes martiniquais, noirs, qui souvent se posent la question de leur identité en arrivant dans l’hexagone, parce qu’ils sont confrontés à un environnement, qui parfois les conduit à croiser le chemin du racisme, ou celui d’étudiants africains, fiers d’être africains.

    Quant au fait qu’il ne se soit pas impliqué émotionnellement dans la rédaction de son livre, mais ait gardé au contraire une sorte de distance, c’est probablement le reflet d’une démarche intellectuelle qui vise à se montrer factuel, et éviter tout débordement personnel ou émotionnel, que toute personne critique vis-à-vis de la question identitaire noire, aurait utilisé pour remettre en question justement cette probable dimension factuelle de l’oeuvre, et ainsi la faire passer pour une quelconque jérémiade d’un noir ou métis en manque de reconnaissance sociale.

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